Julien Collomb : « Tout autre résultat qu'une victoire ferait tache »
- 29 août
- 8 min de lecture
Chaque veille de match, la Tribune Mancelle met en place sa "Zone Mixte". Le principe ? Interroger une personnalité qui connait bien le prochain adversaire du Mans FC pour obtenir son analyse sur l'équipe et le match à venir.

Une victoire, un nul et une défaite : après trois journées, le relégué rémois et le promu manceau affichent un bilan similaire. Ce quatrième match peut donc permettre au potentiel vainqueur de prendre le bon wagon et de se replacer en haut de tableau. Pour en savoir plus sur les enjeux de ce match, et notamment du point de vue de nos adversaires, nous avons échangé avec Julien Collomb, journaliste rémois !
Bonjour Julien, vous êtes journaliste sportif à L'Union et à L'Ardennais, et suiveur du Stade de Reims, pouvez-vous vous présenter plus en détails ?
J'ai 34 ans, je suis originaire de Bourg-Saint-Maurice, en Savoie, et je travaille au service des sports des journaux L'Union et L'Ardennais depuis janvier 2018.
Le Stade de Reims sort d’une saison très compliquée en Ligue 1, soldée par une relégation après des barrages perdus face à Metz. Quelles ont été les conséquences d’une telle désillusion sportive ?
C'était vraiment une saison cauchemardesque pour le club, relégué en Ligue 2 alors que pas grand monde ne le voyait se retrouver dans cette situation. Au soir de la 30e journée, et une victoire contre Toulouse (1-0), le Stade de Reims comptait 32 points. Il n'en a finalement pris qu'un sur les quatre dernières journées, au terme d'un match absolument affligeant à Montpellier (0-0), déjà condamné, pour se faire finalement doubler par Le Havre sur le fil. Résultat, la première finale de Coupe de France du club depuis 48 ans a été complètement gâchée par le fait de disputer les barrages.
Conséquence : une atmosphère tendue autour du club, à l'image d'un lien distendu avec les supporters, dont certains ont même appelé à la démission des dirigeants, une relégation inattendue, en tout cas absolument pas planifiée, et donc derrière la nécessité de composer et de s'adapter financièrement à la Ligue 2 (baisse du budget, ventes...), avec derrière tout ce que ça implique : championnat moins médiatique et moins attractif, moins d'entrées billetterie (avec des tarifs revus à la baisse également) et donc tout un écosystème à repenser. Avec, aussi, un changement d'entraîneur et un renouvellement de l'effectif.
En sept ans passés dans l’élite, Reims semblait s’être stabilisé à ce niveau et pouvait même ambitionner à moyen terme une place pour les compétitions européennes. À quel moment la machine s’est-elle enrayée ?
Ce qui est certain, c'est que le Stade de Reims était devenu au fil des années une formation respectée en Ligue 1. Capable de faire des coups, avec un club qui avait une image sérieuse, travailleuse, et avec chaque année une équipe qui, à défaut de toujours faire grimper ses supporters aux rideaux dans le jeu, comptaient un collectif fort et de bonnes individualités. Au point de battre des formations réputées de l'élite. Concernant la lutte pour l'Europe, elle s'est d'ailleurs souvent trouvée en bonne position, on se disait que peut-être ce pouvait être la bonne année, avant de finalement flancher dans la dernière ligne droite.
La machine s'est enrayée parce que, à mon sens, cet effectif justement bâti pour jouer mieux qu'un simple maintien (peut-être pas les places européennes dès cette saison 2024-2025 au vu de la forte concurrence) n'était justement pas bâti et conditionné pour se battre pour le maintien.

La vente d'Emmanuel Agbadou et de Marshall Munetsi au mercato d'hiver, même si elles résultaient aussi de promesses faites aux intéressés et d'une question financière, ont inévitablement affaibli l'équipe et le groupe, qui a perdu deux véritables leaders. Et même s'il est aussi juste de rappeler que l'effectif a aussi subi des blessures préjudiciables (Reda Khadra, Mohamed Daramy), et que ses jeunes éléments notamment issus de la Pro 2 étaient "verts" à ce niveau, ce groupe avait pour moi largement les capacités de se maintenir. Ce fut un vaste gâchis.
Des confrontations directes ont été très mal négociées (1-1 contre Le Havre et 1-2 contre Nantes à Reims, 0-0 à Montpellier, 0-2 contre Saint-Etienne lors de la 33e journée...), alors que juste avant, les Rémois avaient réussi à battre Marseille (3-1) ou à aller s'imposer à Lens (0-2). Le groupe n'a peut-être pas non plus su prendre conscience de la dangerosité de la situation, avec des individualités aussi qui sont passés à côté. Et le staff, mené par Samba Diawara depuis le limogeage de Luka Elsner, n'a pas su non plus insuffler, sur la durée, ce vent de révolte.
Reims a beaucoup vendu cet été (Ito, Diouf, Sangui, Koné, Diakhon…), et s’attend encore à perdre plusieurs joueurs, dont Atangana et Nakamura. Le club a-t-il su compenser ces départs pour être compétitif en Ligue 2 ?
Le club a beaucoup vendu et pour les joueurs que vous avez cités, soit ils disposaient d'un bon de sortie, soit l'offre correspondait aux attentes, soit l'opportunité financière était difficilement refusable. Et pour s'adapter, comme dit plus haut, aux paramètres de la Ligue 2, et notamment celui d'un budget inévitablement en baisse. Le Stade de Reims s'est en tout cas davantage signalé sur le plan des départs, mais ce n'est malheureusement pas une surprise, c'est très souvent le lot de chaque équipe qui se retrouve reléguée.
Au niveau des arrivées, celle de Nicolas Pallois, même s'il sera forfait ce samedi et seulement de retour avec la trêve internationale, est une évidente bonne pioche. Parce que c'est un joueur d'expérience, qui connaît la Ligue 2, et l'effectif a besoin de joueurs expérimentés pour entourer tous ces jeunes. Celle de Yohan Demoncy aussi, tout comme celle d'Antoine Leautey cette semaine. Le dernier en date, Elie N'Tamon, on va apprendre à le connaître mais il était en tout cas clair que depuis la grave blessure de Joseph Okumu, il était indispensable de recruter en défense, et ce même si Abdoul Koné, plutôt spécialise du poste de latéral, a montré de bonnes choses en charnière centrale.
Le club a récupéré aussi des retours de prêt (Ewen Jaouen, auteur d'une saison intéressante à Dunkerque par exemple, est un gros potentiel au poste de gardien, il vient d'ailleurs d'être appelé avec les Espoirs), et on peut presque aussi considérer Reda Khadra comme une recrue, lui avait été gravement blessé au genou en septembre 2024. Quoi qu'il en soit, l'effectif va encore évoluer d'ici la fin du mercato.
Si l’AS Saint-Étienne semble être un cran au-dessus des autres équipes, qu’en est-il du Stade de Reims ? Les Rémois ont-ils eux aussi l’ambition et les capacités de remporter le titre de champion ?
En termes de qualité d'effectif, de budget, d'argent dépensé durant le mercato, l'ASSE est armé pour remonter directement et est le grand favori. Le Stade de Reims, même s'il faudra attendre la fin du mercato pour connaître l'effectif définitif et donc jauger de ses capacités sur le long terme, fait inévitablement partie des favoris, de par son statut de relégué et son budget. Il est un candidat évident à la remontée directe et c'est ce qu'il doit viser, parce qu'il ne faut surtout pas s'enraciner en Ligue 2.
Revenu à Reims l’hiver dernier, Jordan Siebatcheu est amené à devenir le leader d’attaque du club rémois. Quelles attentes placent en lui les supporters rémois ?
Les attentes étaient grandes à son arrivée parce que c'est un enfant du club et que son recrutement avait suscité un certain espoir et enthousiasme pour une équipe en panne offensivement. Il avait contribué à la remontée en 2018 (17 buts et 7 passes décisives en 35 matches de L2), formant à l'époque une doublette redoutable avec Pablo Chavarria.
À son retour, il n'a pas eu de chance. Il avait clamé la veille de son retour au terrain (pour le match de Coupe de France à Bourgoin-Jallieu) sa volonté d'être un leader pour le groupe. Il était entré en jeu et s'était malheureusement blessé. Il a ensuite marqué des buts importants, comme contre Toulouse. Avant comme l'équipe de ne pas trouver les ressorts pour maintenir le club en Ligue 1.

Il était titulaire lors des trois premières rencontres de cette saison et pour l'instant, on ne peut pas dire qu'il ait donné satisfaction. À lui, justement, d'être le leader de cette attaque et j'espère qu'il va le redevenir sur la durée, parce je pense que le Stade de Reims aura besoin de lui et de son expérience pour atteindre ses objectifs.
Arrivé cet été en provenance d’Annecy, Yohan Demoncy vit des débuts compliqués avec Reims, et semble être déjà pris en grippe par les supporters à cause de son attitude. Pensez-vous que le joueur peut inverser la tendance et s’imposer au club ?
Concernant Yohan Demoncy, je vais juste vous répondre sur le foot et le terrain. Pour moi, c'est une bonne pioche, et sans doute l'un des meilleurs joueurs du championnat la saison dernière. On ne marque pas 7 buts et on ne délivre pas 5 passes décisives en L2 sans être un joueur de qualité. Si Annecy a eu ce parcours, il en était un artisan majeur. On ne peut pas non plus tirer de conclusions trop hâtives de sa première à Pau, tant l'équipe rémoise fut empruntée, et qu'il a appris qu'il était titulaire lorsque Teddy Teuma a déclaré forfait en se blessant à l'échauffement.
Je pense simplement qu'en ce début de saison, Karel Geraerts a été davantage convaincu par Teddy Teuma (qui a fait à mon sens une bonne préparation et deux premiers matches intéressants), que Mory Gbane est le joueur choisi pour évoluer devant la défense, et que Patrick Zabi n'a pas volé sa place non plus, quand bien même c'est un joueur qui doit encore gagner en rigueur et en simplicité dans son jeu. Je ne sais pas tout non plus et peut-être que l'histoire de la saison me fera mentir. En tout cas, il devrait déjà selon moi démarrer la rencontre face au Mans, Teddy Teuma étant forfait. Et sur la durée, je le vois aussi devenir un joueur important.
Cette année encore, un certain nombre de joueurs issus du centre de formation rémois viennent renforcer l’équipe première. Peuvent-ils avoir un impact majeur sur le jeu de l’équipe et aider Reims à atteindre son objectif de remontée ?
Miser sur la jeunesse fait à la fois partie d'un projet et d'une nécessité, celle de s'adapter avec moins de moyens. Mais je maintiens que pour que celle-ci performe et se développe, il faut qu'elle soit encadrée par des joueurs plus expérimentés. Tous ces jeunes (Abdoul Koné, Martial Tia, Yaya Fofana qui est blessé, Patrick Zabi, Hafiz Umar Ibrahim, Thiemoko Diarra buteur contre Guingamp ou Mohamed Ali Diadié entré contre Pau) ne manquent pas de qualités et si la mayonnaise prend, ça peut donner quelque chose de sympa. Mais ils ne pourront pas porter l'équipe sur leurs épaules.

Après trois journées, Le Mans et Reims comptent tous les deux 4 points et sont au coude-à-coude au milieu de tableau. À quel genre de match les suiveurs rémois s’attendent-ils ?
À un match difficile et accroché, comme ce que va rencontrer chaque week-end le Stade de Reims. À l'image de celui disputé lundi à Pau (2-0). En revanche, soyons clairs, et avec tout le respect que j'ai pour cette équipe mancelle, c'est un promu. Le Stade de Reims ne doit donc pas se louper, d'autant plus à la maison, et dans la foulée de ce match manqué à Pau. Tout autre résultat qu'une victoire, avant la trêve, ferait tache.
Enfin, quel est votre pronostic pour cette rencontre ?
Une victoire 3-1 du Stade de Reims.
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